mardi 17 janvier 2012

                                             CUEILLETTE DE MUGUET MACHECOUL NANTES 
                                                                     LES VENDANGES
                                                                   FÊTE DE NOËL
                                               CUEILLETTE DE MUGUET MACHECOUL NANTES  

                                                   COURS DE CUISINE A L'AMI GRATUIT

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dimanche 15 janvier 2012

« Madame Catherine », entourés de quelques migrants africains et des Pays de l'Est au camping. La fondatrice et créatrice de l'Ami partage leur quotidien pendant une semaine.
Plus de 180 étrangers participent à la cueillette du muguet à Machecoul. Ils sont encadrés par Catherine Libault, qui fait de l'intégration des migrants par le travail son combat.

16 h 30, la journée de cueillette du muguet s'achève. Au camping de Machecoul, Catherine Libault, aidée de deux amies, prépare un boeuf bourguignon... pour 187 couverts. Ce soir, comme chaque jour pendant une semaine, la fondatrice et directrice de l'association nantaise Ami (Accompagnement Migrant Intégration) partagera son repas avec les migrants qui participent à la cueillette à la Haute-Pommeraie.
Ces travailleurs étrangers rentrent au camping, certains fatigués, d'autres le dos endolori, mais tous avec le sourire. « Cette semaine de boulot, c'est des vacances pour eux, explique Catherine. Ils ne galèrent pas pour trouver un logement le soir ; l'ambiance est conviviale ; et ils peuvent travailler ! »
« Ça me fait plaisir de gagner de l'argent (N.D.L.R., 9 € de l'heure), confie cet enseignant de La Guinée-Conakry. Il me servira à payer l'avocat pour régulariser ma situation. Ici, on est très bien accueilli. » Une bouffée d'oxygène dans une vie d'exclusion.
Âgés de 25 à 35 ans, ils viennent de Tchétchénie, d'Arménie, du Congo, de Centrafrique... d'où ils fuient des problèmes politiques, ethniques ou religieux. Dans leur pays, certains étaient ingénieurs, architectes, avocats, ou encore sages-femmes.
De l'argent pour payer les avocats
24 nationalités se côtoient sur le campement de 33 tentes. Une trentaine d'entre eux est aussi hébergée chez l'habitant. Dans les allées du camping, Catherine, 50 ans, est sollicitée toutes les cinq minutes, un peu comme une mère. « J'ai été piqué par quelque chose, ça me gratte », dit un Africain. « Vous avez des chaussures ? », interroge une femme des pays de l'Est, en lui montrant ses sandales. Ils la connaissent tous ; elle connaît chacun de leur prénom. À l'association, cette juriste de formation s'occupe du suivi juridique de leur dossier. On l'appelle « Madame Catherine ».
Ce petit bout de femme sait se faire respecter. « Ils savent qu'ils sont radiés s'il y a un problème ! » Son association, qui vit avec de faibles moyens, aide les étrangers à s'intégrer en rendant certaines activités obligatoires : cours de français, instruction civique et sport. Elle se bat surtout pour leur droit au travail.
Demandeurs d'asile, réfugiés, étrangers munis d'un titre de séjour, ils sont plus nombreux d'année en année à se voir proposer un contrat saisonnier. « Nous avons commencé la cueillette il y a cinq ans, avec deux migrants. En 2008, ils étaient une quarantaine. Aujourd'hui, 187. » L'employeur éprouve de plus en plus de difficultés à trouver sur place la main-d'oeuvre nécessaire. « Très peu de chômeurs sont intéressés par ces contrats courts et fatigants », précise Catherine.
Une dérogationpour le travail saisonnier
Elle porte cette « chaîne de la solidarité » à bout de bras. Plusieurs « partenaires » interviennent aussi : le maraîcher, Jean-François Vinet, loue des navettes. La Banque alimentaire fournit la nourriture. La Croix Rouge, des tentes. Le maire prête tables et chaises. L'inspection du travail valide les contrats de travail en 48 heures. Et surtout, la préfecture accorde aux étrangers un droit au travail, qui leur est refusé le reste de l'année.
La Loire-Atlantique est l'un des rares départements où ils peuvent bénéficier d'une dérogation trois fois dans l'année : cueillette du muguet au printemps à Machecoul, ramassage des pommes à Arthon-en-Retz et vendanges à Clisson à la fin de l'été.
Sur le campement, parties de foot et éclats de rire ne sont pas rares. Mardi, ces hommes et ces femmes repartiront à Nantes. Leur sourire laissera place à la détresse du quotidien. Certains retourneront dans leurs foyers, d'autres appelleront le 115. Et dans la journée, ils retrouveront « Mme Catherine » à l'AMI, un peu comme un phare dans cet océan de galère.
Nadine BOURSIER.  Ouest-France